La parade des pharaons – Pharaohs Golden Parade. Partie 2, la parade.

A l’occasion de la Pharaohs Golden Parade, Le Bizarreum vous propose deux articles : le premier à propos du contexte et de la logistique, et le second qui sera axé sur le commentaire de la parade.

La partie 1 est par ici avec le contexte et la logistique.

Une parade gardée secrète dans ses détails et son déroulement et qui a été retransmise en direct sur internet et sur de nombreuses chaînes de télévision le 3 Avril 2021 à partir de 18h30. Les emprunts à la symbolique antique et à la mythologie ont été très nombreux durant ces deux heures de spectacle. Ainsi, le passionné ou l’intéressé par l’Égypte antique les aura sûrement repéré lors de la retransmission. Les analyses de symboliques sont une vision personnelle que je tenterai d’étayer avec des éléments historiques et archéologiques tout au long de cet article.

La rediffusion de la parade a été visionnée plus d’un million de fois.

Les couleurs de l’évènement : le bleu et le doré

Depuis la campagne de promotion de la parade sur internet, il a été relativement aisé de comprendre que les deux couleurs principales de l’évènement seraient le bleu et le doré. Des couleurs qui ont pu surprendre le public mais qui ne sont pas anodines dans la symbolique de l’Égypte antique.

Le bleu est une référence à un pigment majeur dans l’art égyptien antique : le bleu égyptien. Ce pigment artificiel est considéré comme un des plus anciens du monde sortant drastiquement des couleurs naturelles ocrées ou ferrugineuses connues dans les palettes anciennes. Une raison qui s’explique simplement par la rareté des minéraux qui offrent une gamme bleu comme le lapis-lazuli. Une pierre très utilisée en Mésopotamie ancienne également mais qui a un coût certain. Ainsi, on retrouve le lapis-lazuli en archéologie dans ces deux zones en bijouterie et ornement.

Lapis Lazuli Healing Powers in Egyptian Jewellery - Amanda Marcucci
Lapis Lazulu

Pourtant, la création d’un pigment artificiel vient combler la rareté de cette denrée, et en Égypte, l’utilisation se précise en 2613-2494 avant J.-C. Le pigment va être utilisé en ornement, en peinture, en encre, en bref sur toutes les surfaces où il peut trouver sa place. Tandis qu’en sculpture, on retrouvera a l’utilisation de la pâte de verre. Une synthétisation qui va se faire en réponse à des actions autour du minerai de cuivre, de sable calcaire et de natron (carbonate de sodium décahydraté ) L’application d’un tel pigment sur une base de plâtre frais permettait l’ornement et cela est très visible dans les temples ayant conservé des traces de polychromie ou tout simplement dans les tombeaux. Plusieurs teintes de bleu sont à séparer dans la colorimétrie de l’Égypte ancienne. Ici on tend dans la parade à se rapprocher du bleu sombre qui représente plutôt la voute céleste en lien avec la cosmogonie égyptienne automatiquement liée à la déesse Nout. Nout possède également un rôle majeur dans le monde des morts et dans la mythologie associée. On la retrouve ainsi dans plusieurs tombes comme dans celle de Ramses VI dans la tombe KV 9 ornée de bleu sombre également.

Le bleu représente alors l’infini mais aussi le ciel ou encore l’océan de façon simple. Mais on retrouve cette couleur dans de nombreux ornements liés au monde des morts : sarcophages, tombeau, ouchebti accompagnant les corps. C’est une couleur récurrente et positive dans le monde des morts qui a sa place dans une procession funéraire moderne.

Cliché personnel – Musée Georges Labit – éléments de couleur bleue.

Le doré est présent jusqu’au titre de la parade puisqu’il s’agit de la texture (parfois remplacée par du jaune) qui va habiller les dieux. C’est aussi un élément important de l’orfèvrerie égyptienne antique et bien souvent, un motif important de pillage. L’or possède une réelle valeur dans la vision des anciens égyptiens en lien avec leurs croyances et leur esthétisme. Le chapitre XV du livre des morts égyptien rappelle par exemple la présence du précieux métal :

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Hommage à toi qui te lèves dans l’or
Qui éclaira le double pays
Au jour où tu fus mis au monde
Lorsque ta mère t’eut enfanté sur -sa- main
Tu as éclairé l’orbe du disque solaire

Hymne à Rè, chapitre XV du livre des morts

Ainsi, les deux couleurs principales de la parade s’expliquent par leur belle complémentarité mais également leur force dans la mythologie égyptienne et encore plus pour leur rapport entre les dieux et le monde des morts. Une parade qui va appuyer de façon régulière sur les codes en lien avec l’autre monde dans la croyance égyptienne antique.

Le scarabée et ses rayons, symbole de la renaissance du soleil possède toute sa place en logo de ce spectacle puisqu’il est un élément important dans l’ornement funéraire et en particulier auprès des pharaons. Le scarabée commémoratif parfois retrouvé en des centaines d’exemplaires en contexte funéraire est notable. La parade est alors un moment de renaissance des pharaons transportés et pourquoi pas une renaissance de l’Égypte sur le plan touristique après des années de difficultés.

Retransmission en ligne internationale.

L’Égypte a fait le choix de retransmettre l’évènement à l’international par le biais d’un streaming web en plus des chaînes arabophones. Comme je l’expliquais en première partie d’analyse, il était possible d’écouter en langue arabe, anglaise et française. Ce qui va dans le sens de l’internationalisation de l’évènement de la part du gouvernement pour l’envoi d’un message à destination de tous et en particulier des futurs touristes. Les commentaires en live étaient survoltés, ça allait très vite et surtout on pouvait y voir des spectateurs de tous les pays. Ainsi, égyptiens et étrangers pouvaient partager ensemble ce moment spécial.

Un évènement de cette envergure ne se concentrait pas uniquement sur la parade, soirée d’inauguration spéciale en compagnie du président de la République arabe d’Egypte Abdel Fattah al-Sissi, Audrey Azoulay directrice générale de l’UNESCO et les représentants culturels locaux était programmée. La première partie de cérémonie se concentrait sur l’accueil de ces personnalités et sur leur visite des salles du musée. Une visite expresse sous l’œil des caméras où l’on découvre l’intérieur du musée qui nous donne une idée de la muséographie choisie pour mettre en valeur et expliquer la civilisation égyptienne.

Le trailer montrait plutôt bien la tonalité du futur évènement. Présenté par Hussein Fahmy célèbre personnalité du monde du cinéma égyptien.

La soirée a été présentée par plusieurs personnes qui se trouvaient au niveau du musée du Caire ou au niveau du musée du NMEC mais également en face de monuments emblématiques de la culture égyptienne. Au musée du Caire se trouvait Jasmine Taha Zaki qui ouvrait ce direct devant un musée mis en beauté par de nombreux éclairages et jeux de lumière. C’est de ce point que le départ des momies est prévu le long d’un tapis bleu installé pour l’occasion.

Jasmine Taha Zaki devant le musée égyptien du Caire.
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Copie écran des plans visibles lors de la parade. On y voit le musée et le tapis entouré de gradins de photographes et journalistes.

En amont de la cérémonie, les pharaons (hommes et femmes) concernés par le transfert sont présentés par Jasmine Taha Zaki avec une projection des visuels concernant chaque roi et reine à l’intérieur du musée du Caire. C’est le moment d’en savoir plus sur eux lors de leur présentation. On appréciera que les momies ne soient pas montrées et qu’à l’inverse, les bustes et statues ont été privilégiés pour les visuels de parade. Pas une seule fois les corps des momies ne seront visibles durant cet évènement. Ce qui est très positif dans une démarche de protection de leur image.

Jasmine Taha Zaki présente les rois et reines, ici Séthi Ier

Le duplex se déplace ensuite en direction du National Museum of Egyptian Civilization, le NMEC avec Aya Ghariani tout d’or vêtue. Journaliste ayant étudié également en France à la Sorbonne, elle nous a régalé de quelques phrases à l’attention du public francophone.

Aya Ghariani en direct du NMEC.
Le NMEC en beauté.

Suite aux interventions à propos de la culture et des musées mais aussi du déroulement de la soirée par les deux journalistes en duplex dans chaque musée, le convoi présidentiel s’est approché du NMEC où s’est déroulée la soirée puisque c’est sur place que les momies sont accueillies en fin de parade. C’est ici que débute la visite du musée en présence du président, de la directrice générale de l’UNESCO et des équipes ministérielles.

Une arrivée masquée en accord avec les règles sanitaires en lien avec le Covid-19.
Le puis numérique avec les projections d’objets et de scènes au cœur du musée. On imagine aisément l’échelle de l’installation.

Cette visite expresse est l’occasion de découvrir les choix muséo faits pour ce nouveau musée – les détails architecturaux sont en partie 1 de mon travail – avec un soclage sobre s’inscrivant dans la continuité des matériaux utilisés pour le bâtiment. De nombreux soclages transparents ont été utilisés pour la présentation d’objets à la verticale.

Soclage transparent pour les objets lithiques dans la partie dédiée à la préhistoire de l’Egypte. Visible derrière Madamr Azoulay.

Élément intéressant, les vitrines sont équipées de lumières qui sont disposées à l’intérieur – j’imagine un système sans chauffe type LED – pour un bon éclairage et surtout éviter les reflets disgracieux de spots sur les vitrines. On constate également que le musée est équipé en outils numériques sans que ces derniers ne soient prépondérants dans l’organisation totale.

On observe bien les six galeries mentionnées dans le projet UNESCO, six galeries thématiques : l’aube de la civilisation, le Nil, l’écriture, l’Etat et la société, la culture matérielle, les croyances et la pensée et la galerie des momies royales. Le hall des momies n’est pas présenté pour le moment puisqu’il sera ouvert 15 jours après cette cérémonie. Le temps pour les momies de passer entre les mains des scientifiques et de s’assurer de leur mise en place en atmosphère adaptée et surtout contrôlée 7 jours sur 7 et 24 heures sur 24. Les raisons de leur exposition et le choix du Caire est expliqué en partie 1 de mon travail encore une fois.

Comme cela a été annoncé en amont de la parade et de l’évènement tout en gardant les détails relativement secrets, nous savions que l’accent avait été mis sur l’implication d’artistes tant en musique qu’en danses mais aussi en son et lumière. La tournure de la cérémonie était tout à fait étonnant puisqu’en tant que spectateur, nous ne savions pas le déroulé précis. Après une longue traversée du musée par le président, c’est une salle décorée visuellement aux couleurs de la parade et des temples antiques qui accueille une assemblée masquée avec un tête le président et les personnes vues pendant la visite.

C’est un spectacle visuel et musical qui se déroule alors avec une retransmission en direct présenté in situ par Nardine Farag qui est une personnalité du monde télévisuel égyptien. La télévision est très importante dans la culture arabophone, et les stars du monde arabe ont une place particulière dans la culture et la société locale. Ainsi, leur présence est logique en lien avec les habitudes de consommation et de divertissement des égyptiens.

Nardine Farag en robe Zuhair Murad.

Avant la partie purement spectacle et divertissement en amont de la parade, c’est un film qui est diffusé autour de la préservation et de la culture dans plusieurs lieux de culte de confession différentes qui est présenté. Une vidéo encore une fois étudiée au millimètre comme l’Office de Tourisme égyptien est habitué à proposer. On peut y voir plusieurs messages dans le choix d’une présentation orientée sur les religions et sur leur multiplicité en Égypte. Un choix qui peut aussi mener à réflexion en lien avec les divers évènements du passé en lien avec les religions dans le pays. Le film est disponible ci-dessous.

Il faut savoir que dans le monde des professionnels du tourisme et des salons de tourisme, l’Office de Tourisme d’Égypte possède en général les stands les plus grands et importants dans ces évènements. Parfois ponctués de spectacles, cette présence de l’Égypte dans ce milieu professionnel est incontournable.

Le choix des costumes

Egypt Forward (@egyptfwd) | Twitter
Youssra et sa robe de chez Tow Ward collection 15-16.

La travail autour des costumes est relativement colossal puisqu’il a fallu habiller tant les artistes que les figurants lors de l’évènement. Plusieurs designers sont à l’origine des robes et des costumes portés tout au long de la cérémonie. Des stylistes du monde arabe avec tout de même à noter la robe d’influence très antique de Tomy Ward collection 2015-2016 pour l’actrice Youssra qui fait une entrée très remarquée dans le spectacle. Un article sur les designers a été publié dans Vogue Arabia, magazine très influent dans le monde arabe quant à la mode et la haute couture. Ainsi, si certains parlent de “costumes” et de “déguisements” la volonté des stylistes n’était pas celle-ci mais bien celle de designer des tenues modernes avec des codes antiques.

Les costumes des figurants est aussi un travail de titan qui a demandé de nombreuses petites mains en amont pour les 1600 costumes nécessaires et fabriqués à la main. Leur conception œuvre de plusieurs stylistes en collaboration est très inspirée, comme pour le reste des costumes dans une cohérence graphique marquée par l’antiquité.

Enchainement de symboles

Le spectacle en amont de la parade est marqué par l’intervention de plusieurs célébrités tant du milieu du cinéma que du chant. C’est une cérémonie placée sous le signe de la musique comme nous le verrons par la suite.

Les seules vues des momies sont les vues sur sarcophage de façon sporadique durant la cérémonie. Aucun corps n’a été filmé pour l’occasion.

Un ensemble de symboles est visible durant l’ensemble de la cérémonie. Après des paroles d’introduction avec en arrière plan une barque égyptienne, le spectacle commence.

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Processions de figurantes costumées depuis le musée du Caire et en amont de la sortie des momies.
De nombreux jeux de lumière et ici d’eau, très caractéristiques du monde oriental et arabe. Des décors perçus comme des atouts esthétiques mais également des avancées en termes technologiques pour les spectacles les plus développés.

Le discours d’ouverture en amont de la partie spectacle est très basée sur la naissance de la civilisation égyptienne et de son rayonnement. Bien que l’Egypte ne soit pas la seule civilisation antique, le choix du texte montre une volonté d’appuyer le discours sur l’héritage pharaonique du pays. Un discours egypto-centré qui s’inscrit dans l’ensemble de la soirée.

Arrivée très progressive de nombreuses barques évoquant la barque solaire avec à leur bord des danseuses.

Les danseuses très présentes en art égyptien ont été ici mises en valeur lors des différentes scènes du spectacle. Devant de nombreux monuments, des chorégraphies ont été créées et présentées. Elles ont transporté le public dans un anachronisme intéressant où la profession de danseuse est parfois mal vue dans la société égyptienne – en particulier pour les danses traditionnelles, être fils ou fille de danseuse est toujours une insulte- pourtant ici, la danse contemporaine est représentées avec goût. Certaines danseuses ont été coiffées avec un chignon haut sur la tête qui, en dehors de sa praticité, m’a rappelé le cône sur les fresques anciennes. Un détail sujet à interprétation mais que j’ai trouvé parlant.

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Tombeau de Menna.
Danseuses au pied des pyramides de Gizeh.
Danseuses au pied du temple d’Hatchepsout à plus de 650 km du Caire.
Des plans de danses ont été pré-enregistrés.
Au pied de la pyramide de Saqqarah
Temple de Louxor.
On voit bien sûr les emprunts dans les gestes aux codes en lien avec l’antiquité souvent utilisés pour représenter cette période.

Musique Maestro !

C’est l’ United Philharmonic Orchestra qui a accompagné en musique l’ensemble de cet évènement conduit par le Maestro Nader Abbassi. 120 musiciens et 100 chanteurs et chanteuses ont participé à ce spectacle mêlant moments instrumentaux et moments chantés d’une rare intensité.

Il est très intéressant de noter que les musiques ont été composées par Hisham Nazih qui est un compositeur de musiques de films égyptiens. D’où le très bon équilibre entre musiques épiques et musiques plus douces tout au long de la cérémonie. Des compositions relevées par plusieurs chanteuses et quelques solistes sur lesquels je vais revenir par la suite.

Il est à noter que cette composition originale possède surtout un détail qui n’est pas anodin. En effet, les paroles chantées sont issues de poèmes mais surtout d’extraits du Livre des Morts. Les chanteuses Reham Abdelhakim, Amira Selim, et Nesma Mahjoub ont été tout simplement plus qu’à la hauteur de l’évènement et ont su apporter l’émotion au texte d’un ouvrage bien souvent méconnu. La composition de l’œuvre a duré 3 mois et a été à l’origine de l’investissement de 200 personnes au total.

Reham Abdelhakim.
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Amira Selim
Nesma Mahjoub

Les femmes représentées en majorité.

Il était très étonnant de constater la place des femmes durant cette soirée spéciale. En effet, tant en danse qu’en chant mais aussi chez les musiciens et en présentation, on ne pouvait pas dire qu’elles étaient absentes. En mythologie égyptienne et en histoire, les femmes ne sont pas absentes non plus, bien au contraire même si dans la parade des momies elles sont minoritaires. Comme je l’expliquais en partie 1, le statut de pharaons a été accordé à 5 femmes seulement durant l’histoire de l’Egypte. Mais ce soir, certaines ont eu une belle revanche comme Hatchepsout dont l’image et l’existence a été martelée jusqu’en son temple pour tenter de la faire disparaître de l’histoire dans le passé. C’est loupé puisque la parade était pour les rois et pour les reines.

Tombe à Thèbes 1425 av JC.

Le convoi des momies

La partie la plus rapide de cette soirée a été le transport des momies. Comme je le précisais en fin de mon premier article, la conception des véhicules et les mesures prises pour la conservation des momies ont été les résultats de nombreux débats entre responsables de collection, responsables religieux et le public. On a pu constater qu’aucune momie n’a été visible à la télévision ou sur les réseaux sociaux, l’exposition des corps n’a pas fait partie de la charte de l’évènement bien que la finalité soit une présentation des corps comme dans l’ancien musée. A la différence que la muséographie est beaucoup plus orientée et complète que celle de l’ancien musée et en particulier autour des croyances et des techniques. Un élément qui manquait beaucoup dans l’ancien musée qui était très sommaire en termes de cartels dans cette salle spéciale dans mes souvenirs.

Ouverture de la procession à travers les portes du musée du Caire.

Le choix du convoi et tout le design autour a été au cœur de nombreuses critiques et de débats encore une fois. N’étant pas du tout présente pour faire une quelconque ingérence sur des décisions qui ne concernent pas ma zone de vie, j’ai observé le convoi…comme quelqu’un qui regarde un spectacle. Les momies sont parties en file indienne à travers la ville qui a vu ses routes barrées et sécurisées pour l’occasion. Si l’on transpose, il s’agit uniquement du transport en corbillard d’individus au cours d’une procession funèbre. Les processions funèbres filmées et diffusées à la télévision font partie des évènements les plus regardés dans les pays concernés et à l’international. Les funérailles les plus suivies du monde ont été celles de Diana avec plus de 2 milliards de téléspectateurs. Pour autant, ici le transport de personnes royales mais momifiées et anciennes semble beaucoup plus troubler l’opinion publique. C’est aussi la dimension politique de l’évènement qui va être retenue et à juste titre dans d’autres analyses de cet évènement. Les éléments à analyser sont divers outre ceux de la symbolique et des contraintes muséographiques : la volonté de l’évènement, le choix de ce dernier et des moyens mis en place pour la diffusion d’un ou plusieurs messages. Messages à l’intention des locaux et ensuite du monde.

Pour le moment, le streaming a été vu plus d’un million de fois en l’espace d’une journée, c’est relativement énorme pour un évènement qui n’a pas une portée émotionnelle ou politique pour tout le monde.

Danseuses arborant l’accessoire des “ailes d’Isis” en tissu lamé qui rappelle les attributs de la déesse en question. Les deux bâtons tenus par les danseuses permettent cet effet d’ailes.
Une procession pédestre a devancé le départ des véhicules funéraires. Le chemin est bordé par les plumes d’autruche comme celles visibles sur l’Atef, la couronne royale portée par Osiris durant certains rituels.
L’intérieur du musée du Caire aux couleurs de la procession.
La présence de chevaux et plus particulièrement de ces deux chars antiques, rappels des accessoires de conquête et de déplacement des pharaons
La place Tahrir où ont circulé les véhicules funéraires.
Les véhicules sont escortés par les motards. L’avancée est relativement rapide.
Vu du dessus c’est un spectacle tout à fait particulier.

Une fin de cérémonie abrupte

Suite à l’arrivée des véhicules au NMEC et l’accueil par le président, le streaming s’est coupé d’un coup signalant la fin de l’évènement aux internautes en ligne. Le transfert des momies vers leurs demeures muséales restera confidentiel. Au total, le spectacle a duré 2 heures, ce qui est conséquent. Pour autant, la cérémonie était rythmée, et bien qu’elle puisse être critiquable du point de vue étranger, de nombreux égyptiens ont partagé leur joie de voir cet évènement et surtout d’accueillir les touristes sur place quand cela sera possible.

Ainsi, la parade a été un évènement réfléchi, pensé et mis en place dans les moindres de détails. Une envergure mondiale qui n’étonne pas en termes de soins apporté à tous les éléments d’un tel spectacle. L’Égypte par cet acte montre sa volonté de revenir sur le devant de la scène touristique culturelle mais également de rassurer les voyageurs qui ont pu être frileux à l’idée de venir dans le pays pour des raisons politiques et sécuritaires.

Les adeptes d’archéologie ont ainsi pu voir les relations entre les scènes montrées et des éléments tenant de l’histoire ou encore de la mythologie. Bien que j’ai pu entendre le mot “kitsch” pour désigner ce spectacle, il faut réellement ancrer dans son esprit occidental que les jeux de sons et de lumières sont prépondérants dans les pays orientaux et en Égypte, ils font partie de l’offre touristique. Voir les pyramides éclairées en rose ou encore en vert n’a rien d’étonnant. Ce spectacle s’inscrit dans les goûts et les codes de la culture égyptienne contemporaine. C’est important de réfléchir en tant que spectateur international. Ce spectacle n’a pas été créé selon nos goûts et n’est pas destiné à nous non plus, même si il est retransmis mais avant tout pour les égyptiens dans un esprit d’unité qui s’inscrit lui-même dans un ensemble de décisions prises in situ.

Si les avis divergent quant à cette parade et à ce spectacle, l’Égypte a montré encore une fois qu’elle n’a rien perdu de sa superbe en termes de communication touristique orientée autour de la culture. L’avenir nous dira quelles décisions ont été adoptées en lien avec les momies mais également en lien avec les futurs musées à venir comme le GEM qui devrait avoir son ouverture en 2021. Encore une fois, ce type d’actions demanderait une analyse poussée en politique par le biais de politologues connaisseurs et impliqués dans l’étude des pays du Moyen-Orient. Une analyse qui sera peut-être produite suite à l’évènement avec un décorticage poussé de ces aspects.

Juliette

Sources :

J. Riederer, Egyptian Blue. In: E.W. Fitzhugh, (ed.), Artists’ pigments3: 23-45. Oxford university Press, 1997,
https://images.cnrs.fr/video/1080 CAPUTO, Paolo ; et al. La fabrication du bleu égyptien à Cumes In : Artisanats antiques d’Italie et de Gaule : Mélanges offerts à Maria Francesca BuonaiutoNaples : Publications du Centre Jean Bérard, 2009 (généré le 05 avril 2021). Disponible sur Internet : <http://books.openedition.org/pcjb/4248>. ISBN : 9782918887973. DOI : https://doi.org/10.4000/books.pcjb.4248.
George Hart, The Routledge Dictionary Of Egyptian Gods And Goddesses, New York, Routledge, 2005,
Daumas François. La valeur de l’or dans la pensée égyptienne. In: Revue de l’histoire des religions, tome 149, n°1, 1956. pp. 1-17.
Cambefort Yves. Le scarabée dans l’Égypte ancienne. Origine et signification du symbole. In: Revue de l’histoire des religions, tome 204, n°1, 1987. pp. 3-46.
https://news.cnrs.fr/articles/the-music-of-antiquity
https://www.courrierinternational.com/article/histoire-le-char-signe-exterieur-de-richesse-dans-legypte-antique
https://multimedia.inrap.fr/atlas/lgv-est-europeenne-2/decouvertes-lgv-est-2/bleu-egyptien-antique#.YGrovz869PY
Parfums et cosmétiques dans l’Égypte antique, Musée égyptien du Caire, 2002.
https://www.businesswire.com/news/home/20210403005010/fr/
https://oxfordbusinessgroup.com/egypt-2020/tourism

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